N°130 - avril 2014

Éditorial et sommaire

La création éclairée par l’histoire - Lors de la première Biennale d’architecture de Venise en 1980, la Strada novissima - décor constitué d’une vingtaine de façades signées d’architectes connus - symbolisait l’émergence du mouvement postmoderne, thème choisi par Paolo Portoghesi, sous l’intitulé “La presenza del passato”(1).

Issu de la critique du fonctionnalisme déshumanisé des grands ensembles née à la fin des années 1960, ce mouvement multiforme a été trop souvent réduit au seul débat de style - modernes contre postmodernes -, alors qu’il questionnait tout autant le développement urbain, intégrant les dimensions sociales et politiques. Il n’est, pour s’en convaincre, que de voir l’extrême diversité des démarches des contributeurs à la Strada novissima : Frank O. Gehry, Rem Koolhaas, Arata Isozaki, Robert Venturi, Franco Purini, Ricardo Bofill, Christian de Portzamparc, etc.
On retrouve cette année Rem Koolhaas aux commandes de la Biennale qui ouvrira début juin à Venise avec pour thème “Fundamentals”, ce qu’il traduit lui-même2 comme un questionnement sur les conditions de l’émergence de la modernité, sur 100 ans d’histoire (1914-2014). Au cours de cette période, on passe de la diversité des architectures locales, identifiables comme telles, à une uniformité globale avec perte des repères ; et Koolhaas d’illustrer cette mutation par une image choc juxtaposant en damier ces situations contrastées. N’hésitant pas à faire référence à la session historique (dans tous les sens du terme) de Paolo Portoghesi, il surprend son auditoire, même s’il a déjà manifesté son intérêt pour l’histoire et le patrimoine lors de la dernière session de l’Agora de Bordeaux en 2012. Le génial inventeur de concepts décrivant le monde contemporain pour mieux s’y adapter et être du côté des gagnants, l’homme de Junkspace et de Mutations3, muterait-il ? Le globe-trotter qui jongle depuis si longtemps avec sa fascination pour la formidable diversité du monde (de Lagos à Shanghai en passant par la vieille Europe) dont il nourrit ses auditoires, et une pratique du projet inscrite dans la mondialisation qui éradique cette diversité, en viendrait-il au doute philosophique ? Rien n’est moins sûr car analyser un processus n’implique pas que l’on veuille le changer.
Koolhaas invite aujourd’hui chaque pays participant à la Biennale à réfléchir aux conditions d’émergence de la modernité sur son territoire, à ses formes, à ses pertes et profits. Il élargit ainsi son ambition, passant d’un regard sur le monde contemporain à un regard sur l’Histoire. Reste à savoir pour quoi faire ? Est-ce simple curiosité ou s’interroge-t-il, avec certains philosophes et économistes4, sur la probable fin prochaine du néolibéralisme - monde réel dans lequel s’inscrit la création architecturale - qui serait victime de ses excès ? à suivre.
Gwenaël Querrien

1 - Commissaire général de la 1re Biennale, Paolo Portoghesi - architecte, historien de l’architecture et enseignant - s’intéresse à la relation entre théorie et pratique.
2 - Cf. conférence de presse du 13/3 avec R. Koolhaas à l’Institut culturel italien. La Biennale se tiendra à Venise du 7/6 au 23/9 et comportera trois grandes sections.
3 -
Junkspace a été publié en 2001 et Mutations en 2000 lors de l’exposition éponyme.
4 - Cf., entre autres, le point de vue du sociologue américain Richard Sennett sur la coopération, moteur indispensable des sociétés,
in Marianne, n°877, 7-13/2/2014.

 

 

Au sommaire

 

"À Saint-Ouen, l’école PEF, ou école zéro énergie", par Gwenaël Querrien
École communale Pef, dite école zéro énergie, 34 rue Albert Dhalenne (Zac des Docks), à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Programme : 17 classes, de maternelle (à partir de 2 ans et demi) et primaire, avec centre de loisirs, restaurant, bibliothèque, parking 38 places, logement de fonction. Établissement prévu pour accueillir 450 enfants à terme (140 actuellement). Maîtrise d’ouvrage : Ville de Saint-Ouen. Maîtrise d’œœuvre : Mikou Design Studio arch. Surface : 4 820 m2. Coût de construction : 11 M€€. Calendrier : concours 2009 ; livraison rentrée scolaire 2013. Labels HQE et BBC.

"Résidence sociale Les Mûriers Paris 20e", par François Lamarre
Restructuration et transformation d’un foyer en résidence sociale de 232 logements, 16 rue Fernand Léger, Paris 20e. Maîtrise d’ouvrage : Coallia, association pour l’insertion à travers le logement. Maîtrise d’œœuvre : Daufresne, Le Garrec & Associés architectes. Intervention artistique : Abdoulaye Konate. Surfaces : 8 176 m2 Hob pour 6 431 m2 Hon. Montant des travaux : 11 M€€ HT dont 300 000 € pour la cuisine-restaurant. Calendrier : permis de construire novembre 2008, démarrage des travaux janvier 2012, fin des travaux janvier 2014.

"Reconversion du quartier de l’Industrie à Lyon", par Gabriel Ehret
Projet urbain sur le quartier de l’Industrie (22 ha) en rive de Saône, Lyon (9e arr.), prévoyant 148 000 m2 de surfaces tertiaires et commerces, 54 000 m2 d’habitat (650 logements dont 20 % sociaux), 5 200 m2 d’équipements publics. Aménageur des Zac Sud et Nord, sous mandat du Grand Lyon : Société d’équipement du Rhône et de Lyon. Plan de secteur : Hyl paysagistes et Didier-Noël Petit arch. ; conception des voiries et espaces publics : Hyl. Phasage des Zac : 1998-2018. Zac Sud clôturée en 2013 : implantation d’entreprises numériques, activités de loisirs, de restauration, équipements de formation, espaces publics. Deuxième phase en cours dans la Zac Nord : logements, tertiaires, équipements publics, commerces de proximité. Avant 2010, premières implantations d’entreprises. 2011-2013 : acquisitions, démolitions, fouilles archéologiques. 2013 : nouvelles voies, déviation de la rue Carret, îlot tertiaire UniverSaône. 2014 : pont Schuman, école Laborde. 2014-2016 : premiers logements. 2015-2017 : aménagement des quais de Saône. 2017-2018 : seconde tranche de logements.

"Paysages en questions : 3 documentaires", par Rémi Guinard
Sacro Gra, documentaire de Gianfranco Rosi. Italie-France, 2013, 93’, prod. Doclab / La femme endormie / Rai Cinéma, dist. Alfama Films. Sortie en salles le 26/4.
Paysages latents, documentaire de Françoise Arnold, France, 2013, 52’, prod. Les productions du Effa, Dvd en vente sur le site Prix public 26,40 €€. Prix collectivités 54 €€.
La Ligne de partage des eaux, documentaire de Dominique Marchais, France, 2013, 108’, coprod. Zadig Films / Arte France Cinéma, dist. Les films du losange. Sortie en salles le 23/4.

"Architraves", par Guy Lambert
Roberto Gargiani (dir.), L’Architrave, le plancher, la plate-forme. Nouvelle histoire de la construction, coll. Architecture essais, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2012, 909 p., 75 €€.

"Alexis Josic. Architectures, trames, figures" par Gauthier Bolle
Bénédicte Chaljub, Alexis Josic. Architectures, trames, figures, coll. Formes & figures, Paris, L’Œil d’or, 2013, 94 p., 15 €€.

"Courchevel, naissance d’une station", par Gabriel Ehret
Laurent Chappis, Denys Pradelle, Guy Rey-Millet, Courchevel, naissance d’une station, Paris, Le Linteau, 2013, 147 p., 20 €€.

"Architecture et jardins mongols", par Serge Santelli
George Michell, Amit Pasricha (photographe), Architecture et jardins moghols, Paris, La Martinière, 2013, 401 p., 69,00 €€.

Mensuels parus