Écoquartiers : vers un projet de société ? - Le développement durable et les écoquartiers sont si souvent invoqués pour valoriser l'image de projets ne visant que la performance thermique, que l'exigeant projet de société qu'ils portent est vidé de sa substance.

Il s'est écoulé près de 40 ans depuis le premier choc pétrolier (1973) et les expérimentations militantes des pionniers de l'écologie, et plus de 20 ans depuis la définition des trois piliers du développement durable - social+économique+écologique - par la commission mondiale sur l'environnement et le développement¹, avant que le Grenelle de l'environnement (2007) favorise, grâce à sa médiatisation, l'émergence d'un vocabulaire commun minimum et d'un embryon de culture partagée entre les divers acteurs de l'aménagement du territoire et du projet urbain - peu ou pas formés à cette vision du monde - et le grand public. Si l'évolution des mentalités est lente, c'est sans doute parce que ce projet de société bouscule les intérêts de puissants lobbies (à commencer par celui du pétrole), mais aussi parce qu'il est complexe, se devant d'intégrer en un tout cohérent des savoirs multiples : géographie, géologie, climatologie, hydrologie, botanique, construction, gouvernance, économie, sociologie, etc. Il faut donc que coopèrent concrètement, autour d'objectifs communs, des acteurs dont les intérêts immédiats peuvent être divergents. En matière de projet urbain, est ainsi remise en avant la responsabilité de la maîtrise d'ouvrage, publique en particulier (ville, communauté urbaine, SEM, société d'HLM, etc.), puisqu'il lui revient de fixer les objectifs du programme, donc des priorités. C'est le retour du politique, au sens noble, sur la scène de l'architecture, aux antipodes du fétichisme de l'"effet Bilbao²" qui veut qu'une architecture-objet magique attire la richesse grâce à sa célébrité fulgurante. Sur la base des trois piliers du développement durable déjà évoqués, et dans le même ordre, le ministère de l'Écologie veut favoriser l'émergence d'écoquartiers dignes de ce nom, répondant donc aux multiples exigences qui en découlent. Reprenant sa grande tradition de concours et de palmarès à valeur exemplaire organisés à l'appui de ses politiques, du logement en particulier (Palmarès de l'habitat, concours Modèles-innovations...), il a lancé en 2008-2009 à l'intention des collectivités territoriales le concours écoquartiers³. Ce dernier innove en ceci qu'il a autant vocation à valoriser des projets jugés remarquables qu'à élargir le cercle en mettant à la disposition des maîtres d'ouvrage (publics ou privés) et des maîtres d'œuvre des outils analytiques d'aide à la conception et à la réalisation d'écoquartiers. Preuve d'une prise de conscience des élus, de nouveaux quartiers surgissent ici et là, hors de ce cadre institutionnel mais dans une veine proche, comme en témoigne le Grand Large à Dunkerque évoqué dans ces pages.
Gwenaël Querrien

1 - Cf. Rapport Brundtland, 1987. Le développement durable mondialisé y est défini comme étant au croisement des préoccupations sociales, économiques et écologiques.
2 - Cf. Archiscopie n°50, mai 2005, éditorial.
3 - Cf. sur www.ecoquartiers.developpement-durable.gouv.fr, la notice du concours, dont les fiches analytiques. 150 projets présentés, une vingtaine sélectionnés.

Au sommaire

"Dunkerque : le Grand Large, un nouveau quartier", Bertrand Verfaillie
ZAC du Grand Large-Neptune, Dunkerque (Nord). Programme : entre 800 et 1000 logements (115 000 m²) en quatre tranches et 30 000 m² d'équipements. Maître d'ouvrage : communauté urbaine de Dunkerque (CUD). Aménageur : S3D. Urbaniste en chef : agence Nicolas Michelin et associés. Paysagiste : Philippe Thomas. Plan lumière : Guillaume et Roland Geol. Première tranche de 216 logements, schéma directeur sur 16 ha, architecture : 21 000 m² Shon. Maître d'ouvrage : CUD, AGUS, S3D. Promoteurs : Nexity, Nacarat, BECI. Bailleurs sociaux : Cottage social des Flandres, Maison flamande. Maître d'œœuvre : agence Nicolas Michelin et associés, avec Christel Giron (concours et études urbaines), Hélène Méhats (concours), Fanny Rozé (études architecturales), Thomas Hermann (études urbaines), chefs de projet. Montant des travaux : 22,25 M€€ HT (valeur 03/2005). Calendrier : concours mai 2005, livraison 2010.

"La machine à soigner, centre hospitalier de Douai", par François Lamarre
Route de Cambrai, site de Déchy, Douai (Nord). Programme : démolition-reconstruction d'un hôpital de type MCO (médecine, chirurgie, obstétrique). Capacité de 584 lits extensible à 650 lits, avec plateaux techniques complets. Maîtrise d'ouvrage : centre hospitalier de Douai, avec la DDE du Nord pour la conduite d'opération. Maîtrise d'œœuvre : Brunet-Saunier architecture ; Olivier Contré (concours et APS) et Christian Chopin (études et chantier) chefs de projet ; architecte associé : Gérold Zimmerli. Paysagiste : Péna & Peña. Coût construction : 101 M€€ HT (valeur 2004). Calendrier : concours 2001, chantier 2005-2008, livraison et mise en service septembre 2008.

"Vies intérieures. École Henri IV, Chartres", par Jean-François Pousse
Groupe scolaire Henri IV, Les Petits-Clos, Chartres (Eure-et-Loir). Programme : crèche, écoles maternelle et élémentaire, restaurant scolaire, salle polyvalente, PMI. Maîtrise d'ouvrage : Ville de Chartres. Maîtrise d'œœuvre : OAL Édouard François, architecte ; Guillaume Trouvé, architecte réalisation ; Lydia Gonthier, Yves Rolin, études. Concours : fin 2006. Livraison : été 2010. Budget : 9,575 M€€.

"Jean Le Couteur (1916-2010)", par David Peyceré

"Architectures de la croissance. Les paradoxes de la sauvegarde", par Guy Lambert
Uta Hassler, Catherine Dumont d'Ayot (dir.), Bauten der Boomjahre. Paradoxien der Erhaltung. Architectures de la croissance. Les paradoxes de la sauvegarde, Zurich/Gollion, ETH/éd. Infolio, 2009, 346 p., all./fçs, 39 €€.

"Monographies de paysagistes", par Anne Demerlé-Got
La collection Green vision, Paris, éd. Ici Interface, fçs/angl., 26 €€. Parus en 2009 :
• Jacques Simon, Empreintes éphémères/Ephemeral traces, 134 p. ;
• Jacques Coulon, Linda Leblanc, Intuition/intention/From intuition to intention, 130 p. Parus en 2010 :
• Catherine Mosbach, Traversées/Crossings, 144 p. ;
• TN Plus, 360°/Three hundred and sixty degrees, 144 p. ;
• Christine et Michel Péna, Pour une troisième nature/For a third nature, 144 p.

"La ville du vingtième siècle", par Thierry Mandoul
Bernardo Secchi, La Ville du vingtième siècle, Paris, éd. Recherches, 2009, 218 p., 22 €€.

"Bulles. Conversation avec Pascal Häusermann", par Rémi Guinard
Julien Donada, Bulles. Conversation avec Pascal Häusermann, préface de Michel Ragon, Bruxelles, éd. Facteur humain, 2010, 120 p., 15 €€.

"Rêves de pierre et de bois, la construction au Moyen Âge", par Arnaud Ybert
Clotilde Dauphant, Vanessa Obry, Rêves de pierre et de bois, imaginer la construction au Moyen Âge, Paris, PUPS, coll. Cultures et civilisations médiévales n°45, 2009, 180 p., 22 €€.