De nouveau, l’Asie. Lauréat du prix Pritzker 2025, Liu Jiakun (69 ans) succède au Japonais Riken Yamamoto dans ce prestigieux palmarès créé en 1979. Originaire du Sichuan, cet architecte a commencé son parcours comme écrivain et fondé son agence en 1999. Basé à Chengdu, il est le deuxième Chinois, après Wang Shu en 2012, à recevoir le Pritzker, sans oublier pour autant le Sino-Américain I. M. Pei (lauréat en 1983). Le jury a souligné combien Liu Jiakun, “libre de toute contrainte esthétique ou stylistique, imagine et construit de nouveaux mondes”. Dès ses premières oeuvres, dont le Luyeyuan Stone Sculpture Art Museum en symbiose avec la nature (2002), qui l’a fait connaître, on sent son intérêt profond pour la culture et le contexte. Dans Positions, le livre qui accompagnait l’exposition-portrait d’une nouvelle génération d’architectes chinois présentée à la Cité de l’architecture et du patrimoine en 2008 (éd. Actar), le critique Frédéric Edelmann disait de ses réalisations : “Toujours différentes, toujours ingénieuses, mais le devin qui saura définir ce qu’est le style de cet architecte n’est pas encore né.” Le tremblement de terre qui secoue le Sichuan en 2008 amène Liu Jiakun à changer son regard sur les choses : il se met alors en tête de récupérer de la matière détruite pour fabriquer des “briques de la renaissance”. Touché par la découverte du cartable d’une petite fille dans les décombres, il construit un mémorial sous la forme d’une tente en béton, dédié à la disparue. À une tout autre échelle, son concept du West Village, réalisé à Chengdu en 2015, est un manifeste sur la mixité des fonctions (travail, sport, loisirs) au coeur de la ville dense. Dans une enceinte construite de 237 × 178 m, il crée un univers original pour renforcer l’interaction sociale dans le quartier. Tandis que le coeur de l’îlot accueille notamment trois terrains de sport, un jeu de rampes qui se termine sur les toits permet aux cyclistes et aux joggeurs de pratiquer leur discipline sur une piste inédite de 1 600 mètres.